avril 23, 2020

Crise du coronavirus : l’occasion de tirer des enseignements pour la lutte contre le changement climatique et l’effondrement écologique ?

Crise du coronavirus : l’occasion de tirer des enseignements pour la lutte contre le changement climatique et l’effondrement écologique ?

Tout comme le virus, le réchauffement climatique est difficile à percevoir.
D’abord physiquement : le virus est invisible à l’œil nu, il se balade sur des postillons et survit sur des objets sans qu’on s’en aperçoive ; de même, des espèces animales entières s’éteignent sans faire de bruit, et la température moyenne du globe s’élève de quelques dixièmes de degrés régulièrement, imperceptiblement.

Ensuite, en termes de conséquences : bien sûr, on compte déjà plusieurs milliers de morts du fait du coronavirus, mais nous, au pire, on a un rhume et un mal de tête ; de même, on voit bien des images d’incendies de forêt gigantesques et de banquise qui fond, mais c’est loin, et nous, aujourd’hui, on a surtout senti que ça c’était rafraîchi.
Pourtant, on reste subjugués par la rapidité avec laquelle la très grande majorité les gens (à quelques exceptions près) s’est pliée à des exigences incroyables (et légitimes !) de confinement. C’est dingue la vitesse à laquelle on se fait à tout.

Alors, pourquoi une telle réactivité et un tel niveau d’acceptation de contraintes dans le cas de la lutte contre l’épidémie, et si peu dans le cas de la lutte contre le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité ?
D’abord, notons que les grands médias en ont fait beaucoup plus pour alerter sur le
coronavirus que sur l’environnement. Il y a bien eu quelques experts-des-plateaux pour expliquer au début que ça n’était qu’une grippette, mais pas de campagne massive de dénigrement comme lorsqu’il s’agit de discréditer les « activistes » du climat.

Ensuite et surtout, les gouvernements (le nôtre avec énormément de retard, après des dizaines de mensonges et aujourd’hui encore en totale improvisation) ont fini par prendre le problème à bras le corps. Et pas qu’un peu. Du coup, si tous les médias alertent et que les politiques s’en occupent, au point de mettre tout le reste entre parenthèse (même la sacro-sainte réforme des retraites, pourtant imposée par 49.3 en plein conseil de défense… sur l’épidémie de COVID-19) ça devient vraiment, vraiment sérieux. Dans le cas du climat, les dirigeants organisent bien des COP annuelles, mais comme il n’est jamais question d’imposer quoi que ce soit aux multinationales, on se dit que la situation ne doit pas encore être si grave. Ce réchauffement, ça doit être juste un peu de fièvre et ça va finir par passer
tout seul…
Il y a bien sûr aussi un ressort individualiste dans notre réaction actuelle (qui n’est peut-être jamais qu’une sorte d’instinct de survie) : on a peur pour soi et pour ses proches. Mais aussi un important ressort solidaire : on a bien compris que le principal problème, c’est l’engorgement des services de soins déjà malmenés par des années d’austérité budgétaire.


Enfin, si on accepte aussi volontiers toutes ces contraintes, c’est qu’on les sait temporaires : même si on n’en connaît encore pas précisément le terme, chacun sait que ça n’est qu’une question de quelques semaines, peut-être deux à trois mois maximum. Et que rien ne nous empêchera de tout reprendre comme avant dès que ce sera fini. Tandis que la lutte contre le réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité nous impose un changement plus radical et surtout plus durable – pour ne pas dire définitif – de nos façons de consommer, d’échanger et de produire.

Pas facile à accepter… surtout pour nos dirigeants qui, même dans le cadre actuel de la lutte contre l’épidémie, ne veulent surtout pas imposer la moindre contrainte aux entreprises et gardent l’œil immanquablement rivé sur le PIB.


Et pourtant, si nous n’effectuons pas rapidement ces transformations économiques et sociales pour sauver notre planète, elles finiront par nous être imposées tout comme celles que nous vivons actuellement. Car, même si nous ne nous en rendons pas compte dans notre quotidien et notre chair, la situation se dégrade aussi chaque jour sur le front du climat et de la biodiversité. Avec des conséquences au moins aussi désastreuses sans doute que celles dues au coronavirus. Et là aussi, sans frontières. Sans que la technoscience puisse nous protéger de l’extinction des insectes pollinisateurs ou de l’acidification des océans.
Sans que le capital accumulé en Bourse et dans les porte-feuilles des grandes fortunes puisse arrêter le moindre tsunami.

Alors les gouvernants « prendront leurs responsabilités » : restrictions des libertés individuelles et collectives, retour sur les conquis sociaux, obligations en tous genres… Après l’échec du capitalisme vert, une sorte de fascisme vert.


Vous n’y croyez pas ? Mais qui aurait cru, il y a seulement quinze jours, qu’il nous faudrait présenter un formulaire à la police pour aller faire pisser le chien ?
Restons chez nous. Informons-nous. Organisons-nous. Inventons le monde d’après, en mieux, dès maintenant. Et retrouvons-nous pour le construire ensemble, contre les puissances de l’argent et leurs serviteurs politiques, dès que possible.